Fiscalité comportementale : est-ce vraiment efficace ?

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Alors que le PLFSS 2025 risque d’augmenter les cotisations des assurés, des acteurs publics (Ligue contre le cancer, Sénat…) appellent à une politique de fiscalité comportementale. L’idée n’est pas nouvelle, avec un regain des expérimentations depuis les années 2010. Si des premières mesures ont déjà montré des résultats d’efficacité sur le long terme, d’autres ont connu des retours plus mitigés, comme les crédits d’impôt ou les subventions pour des comportements sains.  

Définition de la fiscalité comportementale 

La fiscalité comportementale est un champ de recherche et de politique publique qui combine des éléments de la psychologie comportementale (dont les fameux nudges) et de l’économie comportementale.  

Non réservée à la santé, la fiscalité comportementale a principalement été appliquée dans trois domaines : la santé, l’écologie et l’économie.  

Les principaux biais comportementaux sur lesquels joue la fiscalité comportementale sont :  

  • L’aversion à la perte. Exemple : des sanctions fiscales peuvent avoir un impact plus fort que des réductions d’impôt, même si la valeur financière est équivalente. 
  • L’inertie et procrastination . Exemple : la création par défaut du compte Mon espace santé (bien que l’activation soit, elle, manuelle) ou la simplification des démarches administratives.  
  • Le biais de statu quo : Les individus ont tendance à préférer les situations actuelles plutôt que de changer. 
  • La norme sociale  

Exemples de mises en œuvre de la fiscalité comportementale  

Vaccination et prescriptions d’antibiotiques

Au Royaume-Uni, la Behavioral Insights Team (BIT) a testé des stratégies comme envoyer des lettres personnalisées aux contribuables indiquant que la majorité des gens de leur région avaient déjà payé leurs impôts. Cela a augmenté les taux de paiement de manière significative

Taxe sur les boissons sucrées 

Le Mexique (2014), les USA (2015) et le Royaume-Uni (2018) ont expérimenté les taxes sur les boissons sucrées. Si les deux premières visaient à une contribution des consommateurs avec une efficacité d’environ 9%, le Royaume-Uni visait les producteurs, qui ont réduit la teneur en sucres de leurs produits. Un succès qui s’est traduit également par un effet sur la consommation.  

Taxes sur l’alcool et le tabac 

Si les politiques sur le tabac et leurs effets sont connues (meilleurs résultats parmi tout l’arsenal de mesures testés pour l’augmentation des prix mais sans toutefois arriver à contenir le tabac – Les études montrent qu’une augmentation de 10 % des prix du tabac entraîne généralement une réduction de la consommation de 4 % dans les pays à revenus élevés et de 5 % dans les pays à revenus faibles et intermédiaires), coté alcool, l’exemple de l’Ecosse mérite d’être cité : en 2018, un « prix minimum par unité d’alcool » a été introduit.  

Cela a permis de réduire la consommation, en particulier parmi les buveurs à haut risque, avec une baisse de 8 % dans les ventes d’alcool dans les magasins

Les crédits et subventions  

Le Canada et la Finlande ont respectivement expérimenté le crédit d’impôt pour l’activité physique des enfants en 2007 et les subventions pour les « aliments sains » accompagnée d’une taxe sur les aliments gras et salés. Si la première a eu des effets limités, la seconde a montré des résultats mais uniquement à moyen terme.  

Les USA ont également expérimenté la réduction d’impôt en contrepartie de mise en place de programmes sur les maladies chroniques.  

Ces mesures ont montré une efficacité variable. Si les incitations financières, qu’elles soient sous la forme d’une taxation ou d’une subvention, sont une des mesures les plus efficaces, le bilan des politiques de prévention actuelles n’en reste pas moins en-deçà des résultats nécessaires pour contenir les maladies chroniques.  

Le Sénat souhaite aller plus loin 

Jugeant les politiques de prévention actuelles non efficaces, la réédition du rapport d’information sur la fiscalité comportementale de la Commission des affaires sociales du Sénat propose d’aller encore plus loin.  

Parmi les propositions :  

  • Une hausse annuelle des prix de 3,25 % au-delà de l’inflation jusqu’en 2040 est suggérée pour atteindre un prix de 25 € par paquet.  
  • Prix minimum par unité d’alcool sur le modèle écossais  
  • Dispositif de soutien à l’achat des fruits et légumes pour les ménages modestes  
  • Renforcement des actions de prévention mais centrée sur les campagnes d’information  

Sources :

La fiscalité comportementale en santé : stop ou encore ?, Rapport d’information n° 638 (2023-2024), déposé le 29 mai 2024 

Tabac, alcool, boissons sucrées : les taxes comportementales ont-elles un effet sur la santé ? (2024, 5 juin). Vie Publique. Consulté le 17 octobre 2024, à l’adresse https://www.vie-publique.fr/en-bref/294484-tabac-alcool-sodas-la-fiscalite-comportementale-est-elle-efficace

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